vendredi 23 mars 2018

La forme de l'eau : une belle fable rétro fantastique superbement réalisée

La forme de l'eau est un beau film, entre conte de fée et film de monstre revisité, réalisé par le mexicain Guillermo del Toro. C'est une sorte de fable rétro fantastique dans laquelle on se laisse facilement embarquer.


L'histoire se passe aux Etats-Unis dans les années 50, dans un contexte de guerre froide et de conquête spatiale. Elisa est une jeune femme muette, employée comme femme de ménage dans un laboratoire de recherche gouvernemental. Avec sa collègue et amie Zelda, elle récure aussi bien les toilettes que les salles des laboratoires de recherche, se faufilant dans l'ombre d'illustres savants. C'est en nettoyant une de ces salles d'expérience qu'Elisa découvre le sujet d'étude de ces scientifiques : une étrange créature vivant dans l'eau salée ramenée d'une contrée lointaine.

Elisa et Zelda

Les deux employées sont vite confrontées au directeur de la recherche, Richard, un homme effrayant, condescendant, sadique, ambigu et imbu de pouvoir. Il tente de découvrir les mystères de la créature aquatique à force de torture et de mauvais traitements.

Richard, Elisa et Zelda

Elisa, quant à elle, parvient à communiquer en cachette avec la "forme de l'eau" avec patience et douceur, grâce au langage des signes. La jeune femme solitaire et renfermée va progressivement retrouver un sens à sa vie en se donnant pour mission de s'occuper de la créature aquatique. Et lorsque celle-ci est clairement menacée de mort, elle est prête à tout pour la sauver!

Bande annonce :



Un film plein de références

Au début, j'ai trouvé comme un petit air d'Amélie Poulain dans la manière de filmer Elisa, ses attitudes, sa fausse naïveté, ainsi que dans le coté burlesque de son mode de vie. Cette impression se retrouve également dans la musique du début du film. Puis j'ai pensé au Grand Budapest Hotel pour le coté rétro des décors et des paysages urbains et certains personnages hauts en couleur.
Outre ces références, La forme de l'eau, c'est aussi un clin d’œil aux grands films de "créature" démontrant ici que le monstre n'est pas celui qu'on croit.
Le réalisateur rend également hommage aux comédies musicales avec quelques scènes de rêves chantées et l'intérêt d'Elisa pour la danse et les claquettes mais cela reste assez discret.

Elisa

Une histoire d'amour entre personnages torturés

C'est une belle histoire d'amour hors norme et compliquée entre une jeune femme muette et une créature prisonnière. Quasiment tous les personnages de gentils sont des êtres marginalisés à cause d'un handicap, d'une différence, d'une difformité... Et le vrai méchant qui fait peur semble, quant à lui, tout avoir pour être heureux : un boulot en or, une famille parfaite, l'argent, la notoriété... mais on remarque vite qu'il s'agit d'un personnage trouble et ambigu porteur d'une froide violence. En quelque sorte, le film fait une ode à la différence, en en faisant une force dans l'adversité.

Elisa et son voisin et ami Giles

Des thèmes simplistes magnifiquement mis en valeur

Enfin, si les questions soulevées par le film restent classiques (le pouvoir de l'amour pour révéler sa vraie personnalité, comment s'affirmer avec une différence, etc) et le scénario plutôt simple, l'histoire est magnifiquement mise en valeur grâce à une belle réalisation, notamment des décors rétros très réussis et des acteurs formidables. L'actrice Sally Hawkins sort de lot (ou de l'eau? ^^ Cqfd) et donne toute sa force au personnage d'Elisa avec ses expressions faciales et sa langue des signes. La créature amphibienne, interprétée par Doug Jones déguisé avec des costumes en latex et silicone et une tonne de maquillage pourrait laisser croire qu'il s'agit d'une image de synthèse !

La créature aquatique et Elisa

J'ai bien aimé ce film rétro fantastique plein d'humanité et de poésie et teinté d'érotisme. Je ne me suis pas ennuyée une seconde et ai apprécié l'univers du cinéaste. De plus, je pense qu'une deuxième lecture de ce film en ferait ressortir de nombreux détails et de multiples interprétations!

Le forme de l'eau (The Shape of Water) / film américain de Guillermo del Torro, avec Sally Hawkins, Doug Jones, Michael Shannon, Richard Jenkins, Octavia Spencer 
Sortie en France le 21 février 2018.

>> Le film a remporté 4 Oscars : celui du meilleur film, du meilleur réalisateur, des meilleurs décors et de la meilleure musique