lundi 1 octobre 2012

The We and the I


Michel Gondry a plus d'une corde à son arc. Avec The we and the I on est loin de la fiction délurée de The Eternal Sunshine of the Spotless Mind, film que j'avais adoré ou de ces précédentes fictions. Dans ce film, il décrypte de manière quasi documentaire les comportements d'un groupe d'adolescents du Bronx. Toute l'action du film se déroule dans un bus scolaire, à la sortie du dernier jour de classe avant les grandes vacances.


Ces ados sont agités, grossiers, bruyants, tyrans, moqueurs. D'un coté les bizuteurs, de l'autre les victimes, ceux qui se fondent dans la masse, les amoureux... La caméra s’arrête sur ces différentes personnalités pour en saisir toute la complexité, sans jugement, avec une objectivité remarquable. Ces ados, ce sont les enfants de la culture YouTube, accro aux sms, aux vidéos en ligne, aux réseaux sociaux : des moyens de communiquer entre eux, de créer un sentiment d'appartenance en s'envoyant notamment tour à tour des vidéos de petits bizutages. Leurs relations apparaissent vite superficielles, tous sont à la recherche de relations amoureuses tout en faisant passer le sexe pour une chose légère et anodine, tous cherchent à se faire apprécier tout en ayant peur de ce que les autres peuvent penser, tous ont déjà morflé dans leur courte vie et tentent de masquer leurs blessures par des simagrées.

Bande annonce:

Le film se divise en trois parties, dans un premier temps, "the bullies", le nécessaire sentiment d'appartenance de ces ados qui se sentent plus forts en groupe, ensuite "the chaos", les fissures du groupe, les divergences et les disputes, puis enfin la révélation du "I", qui laisse entrevoir la personnalité de chacun au fur et à mesure que le bus se vide et que la nuit arrive.
Ainsi nous suivons l'avancée du bus, sur fond de musique hip-hop. Après chaque arrêt, pendant que le bus se vide, on en apprend plus sur cette fille qui a mystérieusement disparu pendant plusieurs semaines durant l'année scolaire et revient attifée d'une perruque blonde, ou sur ce jeune caïd meneur de bande qui laisse entrevoir ses peines de coeur, ou encore sur cette fille obsédée par l'organisation de sa soirée au point de se gratter jusqu'au sang. Tous les comportements sont filmés avec beaucoup de justesse, on est par exemple touché par la dispute pleine de maturité d'un couple gay. Des éléments de flash back filmés à la sauce Youtube nous en apprennent plus sur le passé de certains protagonistes et sur une tragédie qui se déroule en parallèle de ce trajet en bus...

Un film très bien construit, plutôt réussi, des jeunes acteurs prodigieux. Toutefois, pendant la première partie du film, on subit vraiment d'être dans ce bus, d'en supporter la cohue, le bruit, l'ambiance pipi - caca, on a envie d'en sortir, on attend que l'histoire commence enfin. Mais petit à petit on se laisse prendre dans le jeu des relations entre les personnages, on a envie de savoir quels sont leurs secrets. Et on ne peut qu'admettre la justesse de Gondry qui démontre très bien que les comportements adolescents ne sont que démonstrations et simulations et qu'ils s'efforcent de cacher toute forme de sensibilité, qu'ils essaient juste de se faire une place dans le monde et qu'ils se blindent pour devenir adultes.

Prix de la critique international au festival du cinéma américain de Deauville (2012)

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