dimanche 10 février 2013

dans l'ombre de l'IRA

Shadow Dancer

Vous voulez voir une comédie? Ce film n'est pas pour vous. Vous cherchez un film d'action ou un film politique? Passez votre chemin.Vous voulez voir un film optimiste et glamour? Encore désolée mais ça ne va pas le faire. Mais quel genre de film est donc Shadow Dancer, réalisé par l'anglais James Marsh ?


En regardant la bande-annonce, on s'attend à un film d'espionnage en Irlande du Nord avec en toile de fonds le conflit entre l'IRA et l'Angleterre. Or, le film est un peu différent. Comme souvent, il ne faut pas trop se fier aux bandes annonces.

Bande-annonce:

Le film s'ouvre sur une scène tragique de l'enfance de Collette à Belfast en 1973, un épisode qui la marquera à jamais. Puis on la retrouve 20 ans plus tard, en 1993, le visage pâle et fermé, une beauté simple et froide, déambulant dans le métro londonien avec un sac suspect...
Les plans sont longs, la tension palpable, que ce soit lors de la scène de l'enfance ou dans l'épisode du métro, on sent le danger arriver, on est dans l'attente. D'ailleurs, durant les 20 premières minutes du film il n'y a aucun dialogue, juste des longs plans et des zooms sur le visage de Collette.
Celle-ci est activiste pour l'IRA mais se fera prendre. Mac, l'agent du MI5 qui la coincera lui propose alors un deal : soit passer sa vie en prison loin de son fils et de sa famille, soit retourner chez les siens et lui servir d'indic.


On est plongé dans une Irlande grise, morne et triste, les motivations des membres de l'IRA décrits dans le film ne semblent plus avoir grand chose à voir avec la politique mais tiennent davantage de la vengeance personnelle. Le conflit s'étend sur plusieurs générations et les comptes à rendre entre les deux camps ne cessent jamais. D'ailleurs, aucune allusion aux revendications de l'IRA ne sont vraiment mentionnées dans le film. L'histoire est centrée sur les relations entre les personnages et leur désir de revanche.


C'est l'histoire de femmes prêtes à tout pour protéger leur famille, d'une mère et d'une fille soudées par la tristesse et la désolation. C'est l'histoire d'une famille de Belfast lancée dans une lutte dont elle n'est plus sûre de connaitre les véritables motivations.


C'est l'histoire d'un agent des services de renseignements qui veut protéger son indic alors qu'il s'est fait lâcher par sa hiérarchie.


On est immergé dans les années 90, on ne peut que sourire devant les premiers ordinateurs et la technologie avant-gardiste de l'époque. On sourit aussi lorsque l'agent Mac donne le boitier d'urgence à Colette, aujourd'hui ce serait une micro puce à peine repérable, ici c'est un boitier de la taille d'un CD qu'elle doit cacher dans un endroit discret.

Pourquoi donc aller voir ce film?
D'emblée on est fasciné par le visage si pâle de Collette qui semble refléter toute la misère du monde, elle qui a été si jeune engouffrée dans un conflit qui la dépasse, elle a perdu trop tôt ses illusions et semble rongée par la culpabilité.


Shadow Dancer est un film esthétique prenant, bien que le rythme soit assez lent, une sorte de thriller psychologique où les personnages ont chacun une part de mystère que le réalisateur parvint à préserver. Collette apparaît à la fois comme une victime et une femme coupable, une femme manipulée et une bonne manipulatrice. Il n'y a ni bons ni méchants, que ce soit du coté des militants de l'IRA ou du coté de la police et des services de renseignements qui ne voient en leurs indics qu'un moyen d'arriver à leurs fins.
Un film au style très sobre, sans dialogues inutiles ou scènes superflues. Il y a d'ailleurs de nombreuses ellipses dans le film qui nous laissent imaginer ce qui a pu se passer entre deux scènes. Et la fin est plus surprenante qu'on ne pourrait l'imaginer!

Un film qui permet aussi de faire un lien avec l'actualité en Irlande du Nord et la reprise des hostilités de ces dernières semaines suite au retrait du drapeau britannique de la mairie de Belfast en janvier. Des explications ici.

Shadow Dancer / de James Marsh, avec Clive Owen, Andrea Riseborough. Sortie le 6 février.

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