lundi 25 janvier 2016

"Un coeur en silence" : émouvant roman à 4 voix autour du violon

Voici un magnifique roman d'une auteure catalane qui nous transporte entre Barcelone et Berlin au son du violon et fait se croiser le destin de 4 personnages, tous proches d'un grand musicien. Pour rendre hommage à ce célèbre chef d'orchestre décédé il y a dix ans, un concert est organisé à Berlin, sa ville d'origine et rassemble les personnes qui lui ont été chères.
Alternant subtilement narration au passé et au présent, l'auteur retrace dans Un coeur en silence le destin de quatre personnages qui se sont rencontrés grâce à ce grand musicien.


On suit l'histoire de Térésa, enfant issue d'un milieu très pauvre de Barcelone. Généreuse, curieuse et courageuse, elle trouve un jour un violon et pas n'importe lequel, un Stainer, ce qui va bouleverser sa vie. Plus tard, elle croise le chemin de la jolie mais froide Anna, une fillette mal aimée, abandonnée, qui, une fois adulte, s'est construit une carapace et reconnait elle même avoir perdu son âme lorsqu'elle était enfant. Elle devient une violoniste particulièrement douée. Mais peut on être parfaite lorsque l'on joue sans âme? Teresa et Anna vont avoir une relation très compliquée tout au long de leurs vies sur fond de malentendus, de rancœur avec toujours au centre, le violon. Toute l'histoire est dévoilé subtilement au fil des chapitres.
Il y a aussi Maria, arrivée très jeune au service de celui qu'elle appellera toute sa vie "Monsieur", souvent ignorée voir méprisée par les autres, elle sera pour lui sa gouvernante, puis son amie et même son élève. Elle est celle qui connait tous ses secrets, celle qui le comprend le mieux.
Et enfin il y a Mark qui a grandi à Berlin Est où la musique lui a permis de s'"évader" au delà de ce mur le coupant du monde. Lorsque sa mère décède et qu'il apprend qui est son père, il décide de partir à la rencontre de celui-ci, à Barcelone.

Alternant successivement les quatre narrations, révélant au fur et à mesure les blessures, les secrets, les relations au violon de ces personnages, leurs récits permettent également de mieux cerner celui qui était au coeur de leurs vies, ce professeur, musicien, chef d'orchestre, amant, père, tellement passionné par la musique qu'il en oubliait toute convenance sociale. 

C'est un livre à quatre voix, empreint de beaucoup d'émotion, de tendresse et de mélancolie, comme un magnifique concerto... pour violon. C'est un roman bien rythmé en raison de ces narrations multiples et de l'alternance de récits au présent et au passé. L'écriture est plutôt simple mais émouvante et percutante.

J'ai dévoré ce roman que j'ai trouvé très touchant grâce à la place qu'y occupe la musique mais aussi par la description des relations humaines qui y est faite, ces personnages tous plus ou moins fragilisés par la vie et qui ont trouvé leur salut dans le violon.


Quelques citations :

"Moi, je n'avais jamais pu jouer sans être émue. J'appris à rester sereine, même si c'est encore difficile, mais pendant de nombreuses années, dès que je me mettais à jouer, je devais retenir mes larmes." (Térésa) p. 21

"Je vivais constamment avec l'impression d'avoir un petit trou dans l'estomac, et quand ma mère partait ou me rejetait parce qu'elle voulait rester seule avec un de ses invités, le trou s'agrandissait. Il me devenait insupportable, comme un ulcère qui me rongeait de l'intérieur et dont on ne pouvait freiner les dégâts."  (Anna) p. 40

"Aujourd'hui, alors que je n'arrive pas à comprendre comment nous avons pu vivre si longtemps dans une civilisation si arriérée, malgré tout, il me manque quelque chose : le silence, cette paix imposée qui nous obligeait à nous concentrer sur ce que nous désirions réellement. Il n'y avait rien pour nous distraire. Nous ne possédions que la musique." (Mark) p. 50

"Je me lançais, un peu tremblante, puis me raffermit. Cette musique, accompagnée par le piano, c'était comme entrer au paradis. La salle, la maison, tout cessa d'exister, il n'y avait que Monsieur, moi, la musique et l'histoire d'un berger et d'une fermière qui finissait mal comme il me l'avait racontée." (Maria) p 124-125



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