mercredi 7 décembre 2016

Le changement c'est maintenant, alors "qu'est-ce-qu'on attend ?" Un village d'Alsace montre l'exemple.

Il était une fois un village d'irréductibles gaulois qui résistaient à la mondialisation, au capitalisme et au repli sur soi. Quoi, ça existe? Oui ! Et ce village n'est pas si loin d'ici puisqu'il se trouve dans le Haut-Rhin, à Ungersheim.
Porté par un maire écologiste consciencieux, déterminé à faire bouger les choses, cette petite ville de 2000 habitants est entrée en "transition" dès 2005. En transition vers quoi ? Vers une autonomie intellectuelle, alimentaire, énergétique et sociale, vers une réduction de l'utilisation du pétrole et, de ce fait, de son empreinte carbone. Cette démarche a été formalisée en 2009 dans une feuille de route intitulée "21 actions pour le 21ème siècle".


La documentariste Marie-Monique Robin, réalisatrice d'un documentaire sur l'entreprise Mosanto en 2008 et d'un autre film sur les sociétés autonomes, s'est intéressée au cas de cette commune française qui fait figure d'exemple. Après plusieurs mois d'immersion en 2015 à Ungersheim au contact des habitants, elle a réalisé un documentaire montrant la mise en place de ces projets de transition.

Bande-annonce :


On est loin des effets de style et du dynamisme pédagogique du film Demain qui alternait voix off, interviews, démonstrations graphiques, etc. Loin aussi de la réalisation hollywoodienne du film de Leonardo Di Caprio sur le réchauffement climatique, Avant le déluge, réaliste, alarmiste et finalement assez pessimiste. Dans Qu'est-ce-qu'on attend? la réalisatrice reste centrée sur les habitants de la commune d'Ungersheim, prenant le temps de les interroger sur leur ressenti, leur travail, leur action dans cette ville en transition, sans apporter de commentaires ou d'analyse.

Le film se compose d'une succession d'entretiens avec les habitants du village, réalisés quelques fois en aparté, d'autres fois dans leur milieu professionnel ou lors des réunions communales participatives. La réalisatrice montre comment des villageois ont été emportés par le dynamisme de leur maire et se sont intéressés davantage à l'écologie et à la vie de leur commune. J'ai particulièrement été touchée par le témoignage d'une mamie de 85 ans toujours aussi motivée pour faire changer les choses ainsi que d'une femme en contrat d'insertion qui s'est découvert une vocation dans le travail de la terre.
D'autres habitants témoignent de leur reconversion professionnelle, de leur souhait d'adopter un mode de vie plus sain et plus éthique, ou, simplement, de leur découverte des bienfaits de l'économie sociale et solidaire.


La commune d'Ungersheim s'est engagée à travers ses 21 actions à améliorer les différents aspects de la vie quotidienne de ses administrés. Plusieurs aspects sont abordés dans le film.
En terme d'agriculture et d'alimentation, le village s'est réapproprié des champs pour cultiver des légumes destinés aux habitants du village plutôt que du maïs destiné à l'industrie agro-alimentaire, à cultiver d'anciennes variétés de blés pour faire du pain bio, à proposer une alimentation exclusivement biologique notamment dans les cantines scolaires et ce, grâce à la gestion d'une ferme maraîchère.
En terme d'économie solidaire, la commune encourage les circuits-courts grâce toujours à la gestion de la ferme employant des personnes en contrat d'insertion, à la mise en place d'une monnaie locale et, au final, la création d'une centaine d'emplois !
Concernant l'habitat, la ville suit la construction d'un éco-hameau participatif et d'une maison de la nature. Pour les transports, le cheval a été réimplanté au coeur de la vie du village pour les transports scolaires ou le travail aux champs.
Et enfin, du point de vue énergétique, Ungersheim a investi dans une éolienne en faisant participer les enfants de l'école à son élaboration et a réhabilité l'ancienne exploitation minière en champ photovoltaïque.


Et surtout, l'aspect incontournable de cette transition c'est le coté participatif. En effet, les citoyens ont été sollicités et se sont impliqués de diverses manières dans la vie de leur village. Les notions de lien social et de solidarité souvent oubliées dans notre société individualiste ont ainsi été remises au goût du jour.

Pour finir, Rob Hopkins, enseignant en permaculture, fondateur du réseau de la Transition en 2006 fut l'invité de la commune pour l'inauguration des projets énergétiques. Il salua le travail engagé par ce maire, tout en encourageant de nouvelles initiatives comme celles-ci.


Le rythme du film est plutôt lent (j'ai trouvé d'ailleurs quelques longueurs) mais je pense que c'est intentionnel afin de laisser le temps aux protagonistes de s'exprimer calmement et au spectateur d'assimiler les nombreuses informations. D'ailleurs, à un moment dans le film est abordée la notion de temps, soulignant le fait que dans notre société, nous avons perdu la notion du temps véritable... Veillez toutefois à ne pas être trop fatigué lorsque vous regarderez le film qui dure quand même deux heures. 

J'ai trouvé ce documentaire encourageant et enrichissant même s'il n'a qu'un rôle d'observateur. Contrairement aux autres documentaires cités plus haut, il n'y a pas vraiment d'analyse ici, juste un constat, un regard sur la concrétisation d'initiatives locales. A nous de faire des recherches pour en savoir plus, notamment sur le site de la commune.
En effet, la réalisatrice ne fait que survoler certains sujets. On peut s'interroger alors : en quoi consiste réellement l'habitat participatif ? Quel est son coût et pour quel usage ? Quel est le coût de l'investissement dans les énergies renouvelables et qu'est-ce-que ça rapporte ? Quel est le résultat de cette politique de transition de la commune d' Ungersheim finalement ? Voici ce que j'ai trouvé après avoir fait de rapides recherches :  "Depuis 2005, 120 000 euros ont été économisés en frais de fonctionnement et les émissions directes de gaz à effet de serre ont été réduites de 600 tonnes par an".


A l'heure où le réchauffement climatique semble inéluctable, où on se sent impuissant face à la mondialisation et où les politiques semblent déconnectés de la réalité ou pourris par le pouvoir et l'argent, c'est encourageant de voir un élu local faire bouger les choses, remobiliser les citoyens, redonner confiance à ses administrés. Comme quoi, on peut tous faire bouger les choses, à son échelle. Le changement peut venir d'en bas. Alors, qu'est-ce-qu'on attend?

Qu'est-ce-qu'on attend ? / film documentaire français réalisé par Marie-Monique Robin, avec les habitants du village d'Ungersheim. Sortie le 23 novembre 2016.

Pour en savoir plus, consultez le site de la mairie d' Ungersheim

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