mardi 28 juillet 2015

"Ma mémoire assassine" : excellent polar psychologique coréen

Ma mémoire assassine est un roman coréen dans lequel l'auteur, Kim Young-ha raconte l'histoire bien particulière de ce que l'on peut qualifier un anti-héros.
En effet, le narrateur et personnage principal de ce livre est un ancien vétérinaire âgé de 70 ans qui aimerait bien passer sa retraite tranquillement en suivant des cours de poésie. Petit détail aussi, c'est un ancien tueur à gage qui a commis un certain nombre d'atrocités par le passé, il y a plus de vingt-cinq ans. Mais voilà que la maladie d’Alzheimer s'invite dans sa retraite paisible et que son esprit devient de plus en plus brouillé. Afin de parvenir à garder la tête froide et de garder certains repères, il écrit chaque jour ses pensées et le défilement de sa journée dans un journal.


Il ne sait plus si le chien qui rôde chez lui est le sien ou non. Il oublie de plus en plus de choses. Il voit sa fille adoptive s'éloigner de lui et s'amouracher d'un homme étrange. Dans un contexte ou des meurtres en série sont commis dans la région, cet homme lui semble de plus en plus suspect et dangereux. Pour protéger sa fille adorée, il va devoir reprendre du service, avant qu'il ne soit trop tard, qu'il ne se rappelle plus des dangers qui la menace elle et d'autres femmes, et pire, qu'il ne se rappelle plus qui il est.

C'est le récit d'un homme prisonnier du temps, coincé dans le présent, où le passé devient de plus en plus flou et l'avenir inexistant. Va t'il réussir la dernière mission qu'il s'est donné?

L'écriture est à la fois incisive et métaphorique et le ton emprunt de beaucoup d'humour noir. Les phrases et les paragraphes sont très courts, quelques fois désorganisés, afin de refléter au mieux les pensées de ce cerveau malade, ce qui donne au roman un rythme soutenu. Ce petit livre de 150 pages se lit donc très facilement. 
Et surtout, le suspens est de plus en plus présent dans les derniers chapitres. L'auteur maîtrise tous les codes du polar psychologique et parvint très bien à brouiller les cartes pour le lecteur. Le moins qu'on puisse dire, c'est que le dénouement est des plus surprenants ! Une fois terminé, j'avais envie de relire ce livre afin de voir les détails qui m'ont échappé et d'avoir un nouveau regard sur l'histoire.
Bref, c'est un roman très original par son "héros", son sujet et sa forme !


Quelques citations : 

" Soixante-dix ans de vie. Quand je regarde en arrière, j'ai l'impression de me tenir debout devant la gueule grande ouverte d'une grotte obscure. Et quand je pense à ma mort prochaine, je ne ressens pas grand chose. Mais dès que je ressase mon passé, mon coeur s'assombrit. Comme s'il n'était plus qu'un désert où rien ne pousse, où ne subsiste pas une goutte d'eau." p. 34

" Vivre avec la maladie d'Alzheimer, c'est comme être un voyageur qui arrive perpétuellement un jour trop tôt à l'aéroport parce ce qu'il s'est trompé de date"

"Les gens veulent comprendre ce qu'est le mal. C'est un souhait vain car le mal est comme un arc-en-ciel , plus on s'en approche pour le saisir, plus il se dérobe" p. 117


samedi 25 juillet 2015

"The Americans" : Bienvenue dans le monde des agents dormants pendant la Guerre Froide

Nous voici à nouveau plongés dans les années 80, les changements de décors et d'époque inspirant décidemment les scénaristes de séries. The Americans est une série sur des américains comme son nom l'indique, mais des américains peu ordinaires. En pleine Guerre Froide, au début des années 1980, Phillip et Elizabeth Jennings semblent vivre une vie parfaite dans une banlieue chic de Washington, avec leur deux enfants. Mais tous deux sont en fait deux russes "infiltrés", des "agents dormants" du KGB envoyés il y a plus de 15 ans aux Etats-Unis afin d'espionner les américains et de rendre des comptes à Moscou.


Fondus dans la masse, parfaitement intégrés, sous couverture d'une profession d'agent de tourisme, ils sont des espions professionnels la journée, prêts à tout pour accomplir la mission qui leur a été confiée, tuant presque sans scrupules qui se trouvera sur leur route. Mais le soir, en rentrant au domicile familial, ils reprennent leurs rôles de parents aimants et d'américains moyens.

La famille Jennings au complet

Grâce à quelques flaschback on en apprend plus sur le passé du couple, leur rencontre et mariage arrangé, leur arrivée aux Etats-Unis, leur mission, etc. On est sidéré par ce qu'ils sont capables d'endurer pour satisfaire les demandes du Kremlin et accomplir les ordres. Toute sensibilité est mise de coté, de même que toute espèce de scrupule ou de remord. C'est très déstabilisant. Même au sein de ce faux couple, le doute subsiste et le travail, la mission confiée, la loyauté envers la mère-patrie passe avant tout. Cependant, plus on avance dans la série, plus les missions qui leurs sont confiées se compliquent et la carapace qu'ils se sont créées se fissure très légèrement.
D'une relation formatée, purement professionnelle, peut-il découler une véritable relation amoureuse? La relation complexe entre les deux personnages est au cœur de cette série. C'est presque une intrigue dans l'intrigue principale.

Trailer saison 1

Lorsque les deux équipiers découvrent que leur nouveau voisin fort sympathique est en fait un agent du FBI qui a justement pour mission de traquer les espions du KGB, ils doivent redoubler de vigilance. Le FBI a justement décidé de redoubler d'efforts pour arrêter les agents dormants russes. Et Phillip et Elizabeth sentent l'étau se resserrer de plus en plus autour d'eux. Parviendront t'ils à passer entre les mailles du filet? A qui peuvent t'ils faire réellement confiance? 

Elizabeth et Phillip avec leur agent de liaison

Au fur et à mesure des épisodes, on en apprend davantage sur la belle Elizabeth, le mystérieux Phillip, le voisin et agent du FBI Stan Beeman, son indic' russe et maîtresse l'énigmatique Nina, etc.
Agents secrets, agents doubles, agents triples, attention, il faut suivre, mais la série reste captivante de part la complexité des personnages. En effet, au vue des différentes situations, leurs sentiments évoluent beaucoup. Rien n'est jamais gravé dans le marbre.

l'agent du FBI Stan Beeman

Nina, l'employée du KGB

De plus, le scénario est vraiment bien construit, cohérent, intriguant, avec son lot de rebondissements. A plusieurs reprises, on est surpris du dénouement de telle ou telle situation car, lorsque l'on pense avoir saisi enfin la clé d'un mystère : suspens, rebondissement, on repart pour une nouvelle intrigue !
La série interroge également sur les différents idéaux politiques. Qui est du bon coté, qui est du mauvais? Y-a-t'il vraiment un idéal meilleur que l'autre? Jusqu'où peut-on aller pour servir une cause à laquelle on croit?

Juste un petit bémol à mon avis: on peut reprocher le coté quelque peu trop "glamour" des personnages, avec notamment des héroïnes légèrement trop sexy pour être vraies.
Mais The Americans reste une très bonne série qui a le mérite, pour une série américaine, de faire passer ceux qu'on qualifierait habituellement de "méchants" pour les héros et le FBI, si souvent adulé dans le cinéma américain, pour l'ennemi.

Pour la petite anecdote, le scénario a été écrit par un ancien agent de la CIA, Joe Weisberg, qui a puisé dans sa propre expérience pour décrire au mieux le milieu de l'espionnage américain.(à lire, l'interview du scénariste dans Télérama) Et c'est probablement la clé du succès de cette bonne série !
Personnellement je trouve la saison 2 encore plus captivante que la première. Que nous réserve la troisième ?

The Americans / série américaine réalisée par Joe Weisberg, avec Keri Russel, Matthew Rhys, Noah Emmerich, etc. Saison 1 et 2. 2013-2014. Saison 3, 2015.