lundi 28 janvier 2013

Un film pas si gay

La Parade

La Parade est présenté comme une comédie que ce soit à travers sa bande-annonce ou par les critiques de film. Or, c'est une erreur de voir en ce film une simple comédie. Certes, on sourit quelques fois, mais les sujets abordés sont assez graves et l'histoire retrace davantage des faits de sociétés tragiques.

Bande-annonce :

L'histoire : à Belgrade, un gros dur local nommé Lemon (citron!) qui a participé à de nombreux combats dans les Balkans assure maintenant des missions de sécurité. Il vit avec sa jolie et excentrique fiancée qui le mène à la baguette et avec son pit pull adoré.

En parallèle, un groupe d'homosexuels tente d'organiser la première gay pride à Belgrade après l'échec de la précédente 9 ans plus tôt qui s'est finie dans un bain de sang (véridique) mais les militants se font sans cesse agresser, insulter et harceler par des groupes extrémistes.

Tout semble opposer ce gros dur et ces homos. Pourtant, s'il veut pouvoir organiser son mariage avec sa fiancée avec qui il s'est disputé, Lemon a promis d'assurer la sécurité de la parade. Mais si ses compères ont accepté sans broncher de protéger des prostituées, des politiciens, et même de vider de force un bidonville de ses habitants et de ses enfants en larmes, il n'est pas question pour eux de protéger des "pédés", un comble selon eux.  Lemon part donc accompagné de Mirko, un des organisateurs de la parade, à la recherche de gros bras pour l'aider à assurer la sécurité du défilé. Il se rend en Bosnie, en Albanie et au Kosovo retrouver ses amis, anciens ennemis, faits pendant la guerre. L'occasion de faire un rappel sur les conflits passés. Une sorte de voyage initiatique pour Lemon et Mirko où l'homo délicat et l'hétéro machiste apprendront à se connaitre.


La parade est un film intéressant par bien des aspects. Tout d'abord c'est un film sur l'homophobie, la difficulté d'assumer sa différence dans un pays profondément machiste, où les hommes ont dû montrer leurs muscles pendant la guerre, un pays fragilisé où les néonazis ont gagné du terrain, où l'homosexualité est considérée comme une maladie et les gays comme des pervers. Un pays où la différence fait peur et donc engendre haine et incompréhension.

Un film sur l'histoire des balkans, avec toujours en toile de fond, ces souvenirs de guerres fratricides. Dès le début du film la caméra zoome sur le corps de Lemon parcouru de cicatrices toutes accompagnées de la date d'un combat. Mais les haines d'autrefois ont engendré de profondes amitiés entre Lemon et ses amis albanais, kosovar et bosniac, même s'ils s'insultent et se vannent constamment. Faute de combat ethnique, leur haine s'est tournée vers d'autres minorités... Or, s'ils ont pu vaincre ces différends d'autrefois, n'est-ce-pas un message d'espoir pour vaincre l'animosité d'aujourd'hui envers les homosexuels?


Les personnages sont drôles bien que caricaturaux (les gros bras au coeur tendre, les homos artistes et délicats) mais il y a des scènes vraiment cocasses, comme ces gros balourds machistes et homophobes que se roulent l'un sur l'autre en faisant du judo et adore Ben Hur, film "le plus gay qui existe" selon le couple homo du film! Ou le voyage dans la petite voiture rose de Mirko qui se fait sans cesse taguée. Par ailleurs, il y a de nombreux clins d'oeil aux sept mercenaires tout au long du film. Le réalisateur tire également la sonnette d'alarme face à la montée des groupuscules extrémistes en Serbie

Bien sûr, on est loin de grand film mais Srdjan Dragojevic transmet plusieurs messages de paix, de tolérance et fait un rappel de la situation politique et des moeurs dans les Balkans. De plus, il est intéressant de voir ce film dans le contexte actuel : alors qu'en France le débat fait rage entre les défenseurs du mariage pour tous et ses opposants, le film rappelle que dans d'autres pays le fait d'être homo est considéré comme une véritable tare et ils ne sont pas du tout reconnu comme des gens "normaux" (terme récurent dans le film)

Le film a été plusieurs fois récompensé dans des festivals : prix panorama, prix du public et prix Teddy Bear du public à Berlin, prix du public à Montpellier...
Pourtant, la presse française s'est montrée assez sceptique à son égart. Certains s'attendant surement à une comédie mordante ont trouvé l'humour trop gras (on entend sûrement trop de fois le mot "pédé"). D'autres ont comparé le film avec ceux d'Emir Kusturica, alors que, mis à part l'origine du réalisateur, il n'y a rien de comparable..
Bref, il ne vaut mieux pas se fier aux critiques et à la bande annonce afin de se faire sa propre opinion.

La Parade / film serbe réalisé par Srdjan Dragojevic (janvier 2013)


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