mercredi 24 avril 2013

Un écrivain qui écrit sur un écrivain qui écrit sur un écrivain...


La vérité sur l'Affaire Harry Québert

Voici un roman fleuve de 670 pages, une sorte de saga qui s'apparente à un roman policier sans en être vraiment un, écrit par un jeune suisse de 27 ans.


Le narrateur Marcus, jeune écrivain qui surfe sur la vague du succès rencontré par son premier roman se voit confronté à un gros problème : la page blanche, le manque d'inspiration, l'énorme pression de son éditeur, de son entourage, de sa famille... Il veut devenir un écrivain célèbre et respecté mais ne trouve pas la recette du best-seller et craint de se voir bientôt renié et ruiné.
Lorsqu'il était étudiant, il s'est lié d'amitié avec un écrivain célèbre de 20 ans son aîné, Harry Quebert. Ce dernier lui a ouvert les yeux et appris à être lui même. C'est son ami, son mentor, son modèle, son coach sportif. Aussi, lorsqu'il apprend que son ami de longue date est accusé du meurtre d'une adolescente, la jeune Nola, avec qui il aurait eu une liaison il y a 30 ans, il quitte tout pour aller à Aurora, petite ville du New Hampshire où se déroule l'affaire. Il va se mêler à la police et aux habitants du coin pour essayer de découvrir la vérité sur ce qui s'est vraiment passé il y a trois décennies. En menant sa propre enquête afin d'aider son ami, il va beaucoup s'investir et cela s’avérera au fur et à mesure être une source d'inspiration pour un éventuel futur livre.
Au fil de ses découvertes, il va rencontrer de nombreuses personnes qui ont toutes des blessures et des secrets bien gardés. Et ce qui semblait être une simple histoire d'amour impossible s'avère être un véritable casse-tête.

Dans ce roman, Joël Dicker dénonce le milieu de l'édition, un milieu plus capitaliste qu'intellectuel ou la loi de l'argent et de la productivité règne sur celui de la libre inspiration. Il dresse un portrait de l'Amérique contemporaine, avec ses préjugés, ses peurs. Il parle également de la solitude, du besoin de reconnaissance, de l'amour, de la transmission, de la célébrité et de bien d'autres sujets que je ne peux citer sans risquer de lever le voile sur une part de l'intrigue.

C'est un roman captivant qu'on ne peut plus lâcher après l'avoir entamé.
Joël Dicker a reçu pour ce roman, le Prix Goncourt des Lycéens et le Grand Prix du roman de l'Académie Française en septembre 2012. Effectivement, c'est très bien écrit, une écriture fluide et précise à la fois, avec un grand sens du détail et des émotions retranscrites avec justesse.

L'auteur, Joël Dicker

Bref dans l'ensemble c'est un bon roman. Un écrivain qui écrit l'histoire d'un écrivain qui écrit sur un autre écrivain, voici un sujet original !
Il semble donc que Joël Dicker ait lui trouvé la recette du succès! D'ailleurs, après lecture du livre, on imagine très bien celui-ci être adapté en film.

le site de l'auteur : http://joeldicker.com/

Quelques citations :

p. 23 : "les livres sont devenus un produit interchangeable : les gens veulent un bouquin qui leur plaît, qui les détend, qui les divertit. Et si c'est pas toi qui leur donne, ce sera ton voisin, et toi tu seras bon pour la poubelle."

p. 54 : "C'est la beauté du droit en Amérique, Goldmann : lorsqu'il n'y a pas de loi, vous l'inventez. Et si on ose vous chercher des poux, allez jusqu'à la Cour suprême qui vous donne raison et publie un arrêt à votre nom."

p. 63 : "Personne ne sait qu'il est écrivain. Ce sont les autres qui le lui disent"

p. 133 : "Si les écrivains sont des êtres si fragiles, Marcus, c'est parce qu'ils peuvent connaître deux sortes de peines sentimentales, soit deux fois plus que les êtres humains normaux : les chagrins d'amour et les chagrins de livre. Ecrire un livre, c'est comme aimer quelqu'un : ça peut devenir très douloureux."

p. 167 : Vous voyez, écrire ou boxer , c'est tellement proche. On se met en position de garde, on décide de se lancer dans la bataille, on lève les poings et on se rue sur son adversaire. Un livre, c'est plus ou moins pareil. Un livre, c'est une bataille."

p. 274 : "Vous vous êtes mis à écrire parce que vous deviez écrire un livre et non pas pour donner du sens à votre vie. Faire pour faire n'a jamais eu de sens : il n'y avait donc rien d'étonnant à ce que vous ayez été incapable d'écrire la moindre ligne. Le don de l'écriture est un don non pas parce que vous écrivez correctement, mais parce que vous pouvez donner du sens à votre vie. [...] Les écrivains vivent la vie plus intensément que les autres, je crois."

p. 369. : "Vous voyez, Marcus, notre société a été conçue de telle façon qu'il faut sans cesse choisir entre raison et passion. La raison n'a jamais servi personne et la passion est souvent destructrice. J'aurais donc bien de la peine à vous aider"

p. 397: "Vous êtes esclave de votre carrière, de vos idées, de vos succès. Vous êtes esclave de votre condition. Ecrire, c'est être dépendant. De ceux qui vous lisent, ou ne vous lisent pas. La liberté, c'est de la foutue connerie! Personne n'est libre. J'ai une partie de votre liberté dans les mains, de même que les actionnaires de la compagnie ont une partie de la mienne entre les leurs. Ainsi est faite la vie Goldmann."

p. 411: "Apprenez à aimer vos échecs, Marcus, car ce sont eux qui vous bâtiront. Ce sont vos échecs qui donneront toute leur saveur à vos victoires."

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